Actuellement, l’énergie solaire,
irrégulière, produit directement de l'électricité, qu'on ne sait pas
stocker. L'une des solutions est de produire de l'hydrogène mais le prix
de cette transformation est trop élevé, sauf si l'on trouve un moyen de
réduire le le coût. C'est possible, affirme une équipe suisse, qui
vient de montrer comment transformer l’énergie solaire en hydrogène à
partir de rouille et d'eau…
L’utilisation de l’énergie solaire est une alternative à l’énergie fossile. Mais difficile à stocker, elle n'est utilisable qu'en instantané et lorsque le temps le permet. Il existe toutefois un moyen de stockage,
sujet à de nombreuses recherches. Il s’agit d’utiliser le solaire pour
électrolyser l’eau et former de l’hydrogène. Un procédé parfait sur le
papier : on utilise l’énergie solaire pour créer un carburant sans
empreinte carbone et hautement énergique. Mais les procédés de transformation du solaire à l’hydrogène sont excessivement onéreux et le rendement est faible.
Alors, l’électrolyse
de l’eau par l’énergie solaire restera-t-elle un processus onirique ?
Rien n’est moins sûr. Une équipe de l’École polytechnique fédérale de
Lausanne (EPFL)
développe une technique d’utilisation de l’énergie solaire pour
produire de l’hydrogène à base de rouille et d’eau ! Produit peu cher et
facilement utilisable, l’oxyde de fer
pourrait ainsi trouver un usage inattendu. Le dispositif, encore à
l’état expérimental, est décrit dans un article paru cette semaine dans
le magazine Nature Photonics.
L’idée de transformer l’énergie solaire en hydrogène
n’est pas nouvelle. Cela fait plus de 40 ans que les scientifiques y
travaillent. L’EPFL a rejoint l’équipe de Michaël Gratzel qui inventa la cellule tandem photoélectrochimique (Pec) dans les années 1990. Dans ce petit dispositif, autonome, les électrons produits sont utilisés pour casser les molécules d’eau.
Dans la solution électrolytique, deux couches distinctes génèrent des électrons quand elles sont stimulées par la lumière. D’une part, un oxyde semi-conducteur
supervise l’évolution de la réaction de l’oxygène et une cellule
sensibilisée au colorant libère l’hydrogène d'autre part. D’après Kevin Sivula, un des auteurs de la publication, «
le système est très intéressant d’un point de vue théorique mais cela
coûterait 10.000 dollars de produire 10 cm² de surface ».
« L'oxyde de fer est l'un des pires semi-conducteurs ! »
Sivula et ses collègues ont ainsi volontairement
limité leurs recherches à des matériaux peu onéreux et de grosse
production. Dans leur cellule, le semi-conducteur
qui gère la réaction de l’oxygène n'est que de l’oxyde de fer,
autrement dit de la rouille. Pour l’instant, le rendement maximal de
l’électrolyse est de 3,1 %, mais l’équipe suisse est confiante. «
Avec notre concept moins onéreux basé sur l’oxyde de fer, nous espérons
obtenir un rendement de 10 % dans quelques années, pour moins de 80
dollars par m². »
L’oxyde de fer est-il l’élément parfait ? Pas tout à fait. «
C’est stable et abondant, il n’y a pas de risque que ça rouille
davantage ! Mais c’est l’un des pires semi-conducteurs disponibles ! » admet Kevin Sivula. En conséquence, l’oxyde de fer utilisé dans la réaction redox
n’est pas exactement la rouille que l’on trouve sur un clou. L’oxyde
est renforcé avec de l’oxyde de silicium, d’aluminium et de cobalt.
D’après l’équipe, ces traitements optimisent les propriétés
électrochimiques du matériau et sont faciles à appliquer. La deuxième
couche du dispositif est constituée d'un colorant et de dioxyde de
titane, ce sont les ingrédients de base d'une cellule solaire à colorant.
Si l’oxyde de fer est révolutionnaire, le temps nous
le dira. Ce qui est certain, c’est que ce procédé est basé sur deux
oxydes (fer et titane) dont de nombreuses études feront rapidement
progresser la technologie.

L'électrolyse de l'eau est une technique qui sépare le dihydrogène (H2) du dioxygène (O2), les deux composés de l'eau, à partir d'un courant électrique. © Wikipédia, Licence art libre